C’est demain. Demain ce sera différent. Dans son corps, dans sa chair.
Elle l’a appris il y a peu, de façon brutale, comme si il s’agissait d’un objet ayant déjà servi et qu’il fallait jeter désormais. Ce soir tout est bleu, un peu flou. La peur et la tristesse s’invitent et l’invitent à s’écouter, à prendre soin de ce qui est là. La raison se retire doucement, le mental s’efface. Comme une évidence, elle sent qu’elle a besoin de célébrer et non de sombrer. Elle prépare minutieusement ce rendez-vous avec elle.
D’abord, elle plonge dans un long bain parfumé. Elle masse avec une huile douce chaque partie de son corps tendrement, comme elle le faisait jadis avec ses tout-petits.
Elle revêt sa robe préférée, se coiffe, se parfume.
Elle choisit un bijou et un encens musqué, de la musique et deux fleurs du jardin.
Elle danse un peu au milieu du salon, les pieds nus, le sourire au bord des lèvres.
Ensuite elle se délecte de fruits, de noix et d’un verre de vin.
Chacun de ses gestes est dense, présent, parfaitement incarné.
Elle s’assied, pose les mains au bord de la table, elle respire.
La semaine dernière, elle a écrit sur du papier brut quelques mots, des mots puissants, rien que pour elle, des mots de sang, le dernier. Les notes et les secondes s’égrènent, les mains prennent vie et saisissent la terre glaise préparée à cette occasion. Boue et chair, vie et mort, eau des yeux, feu de colère. Les doigts s’agitent, décident seuls de cette forme qui naît peu à peu et se dresse soudain.
Elle la regarde étonnée. C’est une femme, à genoux. Elle glisse alors les mots écarlates dans le ventre de la statuette qui s’arrondit et devient mère. Elle décide avec le coeur qu’après, après les entrailles meurtries, après demain, plus tard, elle ira enterrer la sculpture dans un lieu qu’elle affectionne particulièrement.
Les semaines, les mois ont passé. Ses muscles et ses pensées se retissent peu à peu. La statuette trône dans la bibliothèque. Trois ou quatre fois, elle l’a prise en main, prête à poursuivre sa décision. Mais chaque fois, elle l’a reposée.
Un matin, c’est une fulgurance. Elle sait, elle comprend. Elle court chercher la couleur et peint son oeuvre en rouge, en rouge sang. Il ne s’agissait pas de l’enfouir, ce n’était pas un adieu mais bien une renaissance. Celle de sa fécondité transformée, de sa créativité transcendée qui, quoi qu’il arrive, vit et vivra toujours en elle.
Incarner dans la matière ce qui se ressent au-dedans a toujours fait partie de la vie des êtres humains. Depuis la nuit des temps, nous célébrons, nous marquons de notre empreinte les étapes importantes de nos existences.
Le rituel est une façon importante et symbolique d’intégrer les changements. Partagé avec les autres, c’est aussi être reconnu.es pour qui nous sommes et ce que nous éprouvons, c’est appartenir à notre clan. Quand le rituel est pratiqué dans la Nature, il peut prendre une dimension encore plus grande. Dans notre environnement originel, celui dans lequel nous sommes apparu.es, dans lequel nos corps se sont modelés, notre réceptivité, notre intuition sont accrues et nous relient au sacré.
Etre inspiré.e, ouvrir dans nos vie si remplies des espaces pour honorer les passages et se féliciter du chemin parcouru. Regarder derrière soi, voir le courage, les étapes et se réjouir.
Voici deux expériences à tenter si tu le souhaites :
Lors d’une prochaine balade en nature et principalement en forêt, ouvre-toi à tout ce qui va te parler ou attirer ton attention. Tu peux aussi avoir formulé l’envie de recevoir des réponses à une question que tu te poses dans un domaine de ta vie. Laisse-toi guider, en mettant ta raison en pause. Tu sentiras peut-être que tu dois t’arrêter à un endroit précis ou tu recevras une idée en entendant le chant particulier d’un oiseau. Agence des branches, des feuilles ou des pierres, trace des signes…laisse-faire. Ensuite remercie comme tu le souhaites et repars, nourri.e de cet acte symbolique. Parfois, le sens ne t’apparaîtra pas immédiatement mais l’émotion positive présente sera la preuve que cela était juste ici et maintenant.
Chaque jour, pose un acte pour ta Terre Mère.
Par exemple : Décide d’acheter de l’eau en bouteille de verre, cultive des plantes aromatiques, achète tes vêtements en seconde main…
En la protégeant, tu te protèges et te relies à Elle. En l’honorant, tu reprends ta place en son sein.
Les ateliers de l’été 2021 : Le rituel – Atelier Nature
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