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Aventure


Partir à l’aventure, avoir une aventure, dire la bonne aventure…Ca fleure bon le dépaysement, ça t’émoustille peut-être ou ça aiguise ta curiosité. Et de le dire ce mot, soudain tu entends : « En avant toute! Toutes voiles dehors! »

Alors, tu te glisses, dans les interstices du temps, de l’espace. Tu vogues loin, plus loin que ta fenêtre, au delà de ton balcon-prison, aux confins des jours joyeux à venir.

Parle-moi d’aventure

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Natures

Quand on parle de la Nature, c’est comme si elle était là et nous ici. Comme si nous pouvions l’envisager, la vivre de l’extérieur.

Et pourtant. Ce feu du soleil ne brûle-t-il en nous? Cette eau qui cascade ne chemine t-elle en toi? Cette terre féconde n’est-elle mes os, mes mains? Cet air du dehors n’est-il notre souffle du dedans?

Nous ne sommes jamais aussi près de nous, qu’auprès d’ Elle, jamais aussi proches de notre nature qu’au coeur d’Elle.

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Soigner


Permettre à ton employé de travailler chez lui
Inventer un nouveau jeu avec ton fils
Ecrire quelques mots en vers ou en prose
Photographier le sourire d’une passante au loin
Intuber un patient pour la neuvième fois ce matin
Prêter une chambre à un colocataire banni
Sentir la peur de celui qui l’a chassé
Caresser un chat errant
Te réjouir pour cette auteure confinée dans sa villa en bord de mer
Organiser des abris pour celles et ceux sans
Jeter des graines aux oiseaux
Pétrir du pain
Embrasser tes enfants via Skype
Préparer des semis
Applaudir au balcon
Coudre des masques
Chérir les habituelles agaceries de lui, d’elle
Faire les courses de ton grand-père
Organiser des cours ou des formations en ligne
Offrir un peu de ton temps, de ton écoute
Garder les enfants à l’école ou chez toi
Continuer à ramasser les poubelles, à distribuer le courrier
A être commerçant.e, informaticien.ne, politicien.ne, chercheur.euse, journaliste…
Imprimer des visières en 3D
Distribuer de bons petits plats au personnel hospitalier
Livrer à domicile, à vélo
Protéger tes client.tes en leur offrant une pique à apéritif pour taper leur code bancaire
Envoyer des mots d’amour à tes amis, tes proches
Prendre des nouvelles des plus lointains
Sourire pour la première fois en entendant ton voisin taper au marteau dimanche matin
Te masser à l’huile chaude
Conduire le train, le bus
Respirer
Cultiver des fleurs
Acheter des bouquets
Donner ton sang
Apprécier ton petit appartement finalement si douillet
Penser au monde d’après
C’est soigner

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Un petit creux

Ce matin, lorsque j’ouvre les yeux , le plafond est toujours blanc avec une légère écorchure près de la porte. Le jour pointe à peine et je le devine à cette façon si particulière qu’il a de s’inviter dans ma chambre, par petits traits discontinus. Un léger bruissement suivis de tapotis divers m’indique que la chienne, qui dort en bas, s’ébroue et doit déjà m’attendre, le nez posé sur sa gamelle. Ce matin , tout semble à sa place, tout semble habituel et pourtant tout est différent. En quelques secondes tout se réaligne dans ma mémoire : les infos suivies de loin en loin, la Chine c’est à 7622 kilomètres; puis plus attentivement, l’Italie c’est à deux heures de vol. Mais pour lui ce n’est rien, la seule distance qui compte c’est celle d’un être à un autre. Pas besoin d’être intime, il suffit juste d’être courtois.e. Je me lève d’un coup.

J’ai un petit creux à l’estomac. Je ne sais pas encore si c’est de la peur ou si j’ai faim. Ou peut-être que j’ai peur d’avoir faim? Parce que, depuis quelques jours, ça s’agite chez nous toutes et tous. On redevient reptiles, on rampe vers l’essentiel ou ce que l’on croit l’être, on serpente dans les rayons et on se love sur notre butin. Un pas de plus et on risque de sortir les crocs. Je respire, je m’étire, je descends, je caresse, je remplis les deux écuelles : eau et croquettes. Un coup d’oeil au garage, il en reste encore un sac. Pour toi ça va. Un arrière-train joyeux me le confirme. J’ouvre le frigo et le congélo pour faire l’inventaire. A vue de nez et si j’écoute ma faim de moineau – sic ma grand-mère- je vais pouvoir tenir facilement. C’est le moment de lâcher ma créativité et d’enfin réaliser le  » un jour faudrait bien que je termine tous ces fonds de paquets! « .

J’ai un petit creux. Je me lance. Finalement c’est pas si mal, un bouillon épinards foies de volaille céleri-rave le tout saupoudré de quelques pages d’un bon bouquin. Terminé! vite la vaisselle! Vite? Nous somme le 18 mars 2020 et j’ai tout mon temps. J’ai même le temps de cirer tous les meubles, de couper l’herbe un brin à la fois si je veux, de téléphoner ou de prendre un bain pendant des heures. En fait, j’avais oublié le temps ou plutôt jusqu’ici, j’avais l’impression de le voir sans cesse un pas devant, insaisissable et moqueur. Maintenant il s’étale nonchalamment, à portée de main. A contrario de l’espace qui lui, peu à peu, rétrécit, nous confine, nous écarte les uns des autres. Car c’est bien de cela qu’il s’agit, s’éloigner les uns des autres. Pour qu’il ne nous saute pas à la gorge, ce germe incolore, inodore, invisible, implacable. Je ferme mon livre.

Le petit creux est encore là. Je regarde les pies par la fenêtre qui se chamaillent pour un infime bout de pain. Ca me fait penser à toi quand tu étais petit et même encore longtemps après. Quand on avait droit à de la grenadine et que tu collais ton verre au mien pour vérifier si on avait exactement la même quantité. A toi aussi, quand on se retrouvait sans le père à la maison et que l’on s’autorisait des « crises de folie », à toi au parfum veste de cuir/chewing-gum chlorophylle qui as suscité mes premiers émois, à toi dont les cheveux pétillaient autant que tes prunelles, à toi qui cachais une chemise de bûcheron derrière ton costume/cravate. A toi qui étais capable de dérouler à toute vitesse l’alphabet à l’envers, à toi qui volais mon balais-brosse pour tes inventions, à toi qui tutoyais le village entier.

C’est comme un défilé. Sortant de l’ombre, bien rangé.e au coeur de l’oubli, ils, elles font la file jusqu’à moi et tour à tour, s’avancent. C’est toi avec qui je partage de grands voyages au fond de ton canapé, toi qui détournes le regard lorsque je sors de chez moi, toi qui ne m’as jamais rappelée, toi que je n’ai jamais rappelé, toi que je trouvais trop bien ou trop peu pour moi, toi qui après toutes ces années, ne m’as pas oubliée, toi que j’ai par des gestes ou des paroles blessé.e et même toi qui ne m’aimes pas d’habitude, toi que j’admire parfois, toi…

J’ai un petit creux toujours. Et je sais maintenant que c’est un petit creux de toi.

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A propos de la Lune mais pas que

As-tu remarqué comme la lune a la cote en ce moment ?

D’ailleurs, je parie que si tu es en train de lire ce post, c’est parce que tu as aperçu sa jolie face ! Moi-même j’avoue, je reçois, via des newsletters, des rituels de pleine ou de nouvelle lune, je regarde des vidéos à son sujet, je lui souris à peu près tous les soirs avant de me coucher et j’ai même une appli hyper réaliste m’indiquant, à tout moment, l’état de la belle dame. J’ai bien noté qu’il était conseillé de me couper les cheveux en lune montante, de bénéficier de sa rondeur pour déployer mes projets ou encore de trier mes armoires quand elle décroît.

Et pourtant, non je ne ressens pas les grands bouleversements annoncés par cette super lune en taureau couplée à l’éclipse. Tout comme je ne me sens pas dans un mood de nouveauté parce que nous sommes le 31 décembre ou au taquet parce que c’est la rentrée.

Paradoxalement , je suis convaincue que notre disharmonie en tant qu’êtres humains vient en majorité de notre déconnexion avec les cycles de la Nature et avec ce qui, pour chacune.un d’entre nous, nous est naturel selon notre personnalité et notre singularité.

Mais…

Est -il bon pour moi de ne plus manger entre 17h et 9h une fois par semaine ?
M’est il profitable de me lever à 5h au lieu de 6 pour réaliser un miracle matinal?
Dormir sur le côté gauche va t il favoriser ma détox nocturne ?
Pratiquer le lâcher-prise me permettre de rencontrer ma flamme jumelle ?
Respirer en alternance…de…

Aujourd’hui, en ouvrant les yeux, au lieu de me laisser envahir par tous les impératifs accumulés , intégrés au fil du temps, j’ai eu envie de me proposer un grand vide. Juste pour voir ce qu’il allait se passer, ne laissant aucune place à une quelconque « to do list » ou à des « il faut que ». Ce matin, j’ai écouté ma peur, qui sans cesse me sussurre : « Si tu ne décroches pas du sucre tu vas avoir des soucis, si tu ne travailles pas tous les jours sur tes projets tu ne mettras rien en place, si tu ne publies pas tous les jours sur les réseaux sociaux, tu partiras aux oubliettes..si..si… » Je l’ai bien écoutée et je lui ai souris. Elle n’est pas habituée.

Ensuite, je lui ai proposé un deal : « Et si on essayait autrement ? Après tout, on verra bien. » Elle a frémi et m’a envoyé des images de catastrophes cataclysmiques dont elle a le secret. Genre : Je ne mange plus que des gâteaux et du chocolat toute la journée, en oubliant de boire de l’eau, en étant avachie au fond de mon canapé à regarder des séries stupides, devenant diabétique, obèse, vieille et repoussante. Du coup, je ne peux prétendre à aucune relation amoureuse ou même amicale. Je ne développe pas d’ activités professionnelles solides, donc je n’ai pas d’argent, donc je ne peux pas vivre décemment, ni réaliser mes rêves de voyages ou de maison idéale. La peur a le chic de forcer le trait. Après tout elle fait son job: t’empêcher de fonctionner autrement qu’habituellement. J’ai regardé le film encore et encore mais j’avoue que j’ai fini par vraiment me lasser.

J’ai décidé qu’aujourd’hui, je me foutais la paix!
Non je ne lis pas la composition de mon paquet de biscuits, oui je bois deux cafés, non je n’ai pas envie de faire le bilan de l’année écoulée ou à venir. En tout cas pas maintenant. Demain? Peut-être..ou pas !

Car finalement, quelles sont mes envies ? Vraiment? A chaque instant ? Puis-je entendre, dans ce brouhaha, ma petite voix, l’authentique, celle qui est juste pour moi ? Celle qui me guidait, enfant ?

C’est étrange de se dire: «J’ai l’impression que je ne sais même pas ce dont j’ai envie».
Pourtant, j’ai envie d’écouter mon envie. J’ai envie de laisser venir l’en-vie, de créer de l’espace pour la vie en moi. Mes envies, tes envies, enfouies à en étouffer, à ne plus pouvoir se reconnaître sous des tonnes, sous ces strates éducatives, parentales, sociétales. Ces injonctions extérieures que j’ai absorbées, inspirées, intégrées au point de devenir miennes.

Alors ce matin, je me fous la paix et simplement, lorsque je sens l’élan de manger ou de boire quelque chose, de voir quelqu’un, de bouger vers un lieu, de me lover dans mon canapé , de lire ce livre, d’écrire cet article, je me demande : En ai-je réellement envie ? Est-ce bien ma tendre petite voix au milieu de tous ces « je dois parce que… », « il faut car… » ?

Il est 19h30, la journée doucement décline. Elle fut intéressante et riche de ma nouvelle expérience. Je n’ai mangé aucun légumes, j’ai du boire deux verres d’eau à peine. Je n’ai pas promené mon chien alors que le temps était sec, je suis loin d’avoir fait 10000 pas, j’ai passé ma matinée à lire dans le canapé, je n’ai même rien planifié pour demain. Et..je me sens bien, tranquille,confiante. Je ne sais pas du tout si je suis capable ou si j’ai envie de poursuivre en ce sens. Et sincèrement, c’est très bien ainsi.

Ce soir la lune est en Scorpion et amorce son dernier croissant mais ça tu le savais déjà n’est ce pas ?

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A la plage

Il s’avance. Short de plage vert pomme, longiligne. Un petit garçon poussé trop vite, la démarche maladroite. De loin, le torse, les bras sont constellés de très grandes tâches, trop grandes. A quelques pas, ce sont des myriades de décalcomanies; certaines vives, imprécises, d’autres délavées, sales. Il s’arrête, debout au bord de l’eau, les chevilles à peine trempées. Bouée fluo jaune gonflée à bloc sous un bras replié comme une aile. Immobile, longtemps, trop longtemps. Si longtemps que quelques yeux se lèvent, quelques regards s’attardent, s’interrogent, se fixent, impudiques. Impassible, fluet, imberbe. Les cheveux clairs, peut-être comme ses paupières.

Et puis, il penche la tête vers ses pieds que les langues d’écume enroulent. Surpris comme une première fois. Et sans doute est-ce la première fois. Incroyable découverte de sa peau, de cette toute petite partie de chair qu’il daigne offrir à la mer. Les épaules luisantes de soleil, il tangue, légèrement. Un sourire par intermittence. Révélation de soi, dilatation de son existence, jouissance d’être. Il est là, juste là. Et, sa joie, sa naïveté infantile explosent de tous ses pores. Bien sûr, c’est bizarre, c’est sans doute pas normal. Il n’est sûrement pas « normal ». On dit « différent » aujourd’hui. A présent, presque tous les regards le détaillent, l’écartèlent, le sondent. Bistouri acéré, chaque oeillade le découpe minutieusement, l’analyse. Pour mieux rassurer les autres corps, leur tirer un soupir de pitié, de compassion, de soulagement?

Il est debout, bien droit, il sourit à l’horizon. Comme un film en boucles infinies, comme le flux et le reflux du grand océan; il redécouvre toutes les quelques minutes la caresse des vagues. Cache-cache orteils, picotis, chatouillis, fraîcheur, chaleur, clapotis. Il reste debout immobile, longtemps, trop longtemps. Seuls les flots ont compris.